Séance 9. L’errance de Gauvain au pays « d’où nul chevalier ne revient »

, par PLAISANT-SOLER Estelle, Lycée Saint-Exupéry, Mantes-la-Jolie

Objectifs

 Il s’agit dans cette séance d’analyser la structure et la signification de la dernière partie des aventures de Gauvain. Celle-ci est en effet particulièrement riche de symboles et interroge l’imaginaire médiéval du merveilleux, que les élèves pourront comparer avec celui rencontré par Perceval au château du Graal.

 Il s’agit en effet de s’interroger non seulement sur la structure de cette partie et de l’errance de Gauvain, mais aussi sur sa signification : réhabilitation du personnage après les accusations portées par Guinganbrésil, et initiation à l’humilité.

 On pourra dès lors ouvrir la question du mythe et de l’allégorie, que les élèves retrouveront par la suite avec l’analyse plus approfondie du Graal : mythe du voyage au pays des morts, où s’affrontent les figures du paradis, et celles du mal, et allégorie du chevalier qui peut, par sa prouesse, gagner le paradis.

Supports

LE CONTE DU GRAAL
 La dernière partie des aventures de Gauvain : de la p. 160 à la fin p. 218.

LECTURES EN CORRESPONDANCE

1) Le verger maléfique

 Chrétien de Troyes, Erec et Enide, vers 5411 à 6181, p. 232 à 258 : L’épisode de la Joie de la Cour est cependant trop long pour être donné en entier aux élèves. On pourra choisir les passages qui se rapprochent le plus des aventures de Gauvain, à savoir sa rencontre avec la Mauvaise Pucelle : vers 5411 à 5465, puis 5694 à 5756, 5870 à 5897.
 Chrétien de Troyes, Le Chevalier au Lion, vers 360 à 543, p. 723 à 728 : La fontaine merveilleuse offre également des points communs avec les aventures de Gauvain. Un lieu enchanteur, marqué par la présence magique de l’eau, donne lieu à un combat singulier.

2) Le passage périlleux

 Chrétien de Troyes, Le Chevalier de la Charrette, vers 636 à 673, p. 519 à 620 : les deux passages de l’eau vers le royaume de Gorre
 Chrétien de Troyes, Le Chevalier de la Charrette, vers 710 à 771 : Le gué défendu
 Chrétien de Troyes, Le Chevalier de la Charrette, vers 2159 à 2810, p. 562 à 563 : Le passage des Pierres évoque les brèches et gorges que franchissent Perceval pour atteindre le château du Graal et Gauvain pour atteindre les terres de Galvoie dont le gardien s’appelle précisément l’Orgueilleux du Passage à l’étroite Voie.
 Chrétien de Troyes, Le Chevalier de la Charrette, vers 3003 à 3135, p. 586 à 590 : Le passage du Pont de l’Epée

3) Le Lit de la Merveille

 Chrétien de Troyes, Le Chevalier de la Charrette, vers 459 à 534, p. 514 à 516 : Le lit et la lance enflammée

4) L’Autre Monde

 Chrétien de Troyes, Le Chevalier de la Charrette, vers1856 à 1936 : Lancelot parvient au cimetière futur et force sa propre tombe.
 Chrétien de Troyes, Le Chevalier de la Charrette, vers 2081 à 2115 : Les gens du royaume de Logres, prisonniers du royaume de Gorre.

Questions

1) Quels indices nous montrent que Gauvain ne voyage plus vers un but défini, comme lors de son voyage vers Escavalon, mais est ici une figure de chevalier errant ?

2) Pourquoi dit-on des terres de Galvoie qu’elles sont un pays d’où on ne revient pas ? Relevez toutes les occurrences de ces expressions dans l’ensemble de cette partie du Conte et interprétez-les.

3) Analysez les éléments de la géographie de ce pays. Quels sont ceux qui reviennent le plus souvent. Comment peut-on les interpréter ?

4) Quelle est la nature des épreuves rencontrées par Gauvain ? Quelle est leur signification ?

5) Analysez la figure de la Mauvaise Pucelle. Quelle fonction joue-t-elle vis-à-vis de Gauvain et de son trajet, géographique et symbolique, au pays d’où l’on ne revient pas ?

Suggestion d’analyse

La deuxième partie des aventures de Gauvain, après le bref retour à Perceval chez l’ermite, offre une unité et une « conjointure » narrative qui méritent d’être abordées. On découvre ici un motif issu de la mythologie celtique : le trajet symbolique vers l’Autre Monde. Plusieurs points peuvent alors être analysés : l’errance, le lieu « d’où nul chevalier ne revient », les frontières de l’univers arthurien marquées par le passage de l’eau. La description même de l’Autre Monde par Chrétien s’inspire de sources celtiques : c’est un univers marqué par la richesse, la merveille, mais c’est surtout un monde en attente, autant d’éléments qui rapprochent le château des Reines de celui du Graal.

Les épreuves de Gauvain doivent alors être abordées sous leur dimension symbolique : réhabilitation du personnage après l’accusation portée par Guiganbrésil, et peut-être aussi après son échec dans le Chevalier de la Charrette, apprentissage de l’humilité et de la charité (si importante dans le prologue) à travers la rencontre de la Mauvaise Pucelle, l’Orgueilleuse de Logres.

Dès lors, on peut percevoir l’importance de la « partie Gauvain » dans l’élaboration par Chrétien d’un mythe littéraire, promis à un brillant avenir. N’est-ce pas la question du bien et du mal qui se pose ici ? Question à rapprocher peut-être de l’interprétation de l’échec de Perceval au château du Graal.

Exposés

 Les chevaliers errants dans la littérature médiévale.
 Don Quichotte, parodie des chevaliers errants de la littérature médiévale
 Les figures féminines dans le Conte du Graal

Suggestions de lectures critiques

 Paule Le Rider, Le chevalier dans le Conte du Graal de Chrétien de Troyes, chap. XI : « Gauvain au pays d’où l’on ne revient pas », Sedes, 1978.
 Michelle Szkilnik, Perceval ou le Roman du Graal de Chrétien de Troyes, Gallimard, coll. Foliothèque n°74. Chap. VII : « Merveilles de l’Autre Monde », p. 97 à 109.
 Frédérique Le Nan, « La male pucelle aux bornes de Galvoie », dans Le Conte du Graal, ouvrage dirigé par Danielle Quéruel, Ellipses, 1998.
 Philippe Ménard, De Chrétien de Troyes au Tristan en prose, chap. V : Le rire et le sourire dans le Conte du Graal », Droz, Genève, 1999.

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