Écrire ensemble par-delà l’océan Compte rendu d’une expérience d’écriture collaborative en ligne

, par Delphine Regnard

A l’occasion de la journée internationale de la francophonie, des élèves québecois et du Mantois (du lycée Saint-Exupéry de Mantes-la-Jolie) ont rédigé des textes communs.

Tout a commencé avec Twitter : sur ce réseau social, j’ai tissé des liens professionnels avec nombre de professeurs de lettres (une soixantaine) dont des professeurs enseignant le français à l’étranger, notamment au Québec, pays francophone. C’est ainsi que j’ai fait la connaissance de deux enseignants de Québec : Annie Côté, professeure de français en 5ème secondaire à l’école Saint-Pierre et des Sentiers, et Sylvain Bérubé, enseignant de français en 1ère et 3ème secondaire (élèves de 12-13 et 14-15 ans) à l’école secondaire De Rochebelle.

Le projet

Il s’agissait de faire écrire ensemble des élèves de Lycée en France (TL en Littérature et Tle en Latin ; anciens élèves) et des élèves de Secondaire au Québec pour célébrer la francophonie et la rendre vivante pendant la semaine de la francophonie.

Objectifs

 Pédagogiques : écrire un texte de fiction selon des contraintes (de temps, de forme) sur un EtherPad (un éditeur de texte en ligne où plusieurs personnes peuvent écrire en même temps) ;
 Méthodologiques : apprendre à négocier avec d’autres scripteurs ;
 Culturels : partager le plaisir d’écrire en français ; découvrir du vocabulaire ; participer aux actions de la francophonie.

Démarche et activités

 Phase préparatoire : une réunion entre les trois enseignants via un logiciel de vidéoconférence gratuit pour fixer des objectifs et des consignes communs, la prise de notes se faisant sur un traitement de texte en ligne accessible aux trois professeurs.

 Dans la semaine du 19 mars 2012 consacrée à la Francophonie, avec notamment la date du 20 mars déclarée Journée Internationale de la Francophonie (voir le site dédié), nous avons proposé à nos élèves d’écrire un texte selon les modalités suivantes :

  • pour les élèves français, l’activité d’écriture fut fondée sur le volontariat car elle se déroula hors temps de classe, faute de temps dédié ; pour les Québecois, l’activité s’effectua en classe avec la possibilité de poursuivre à la maison ; ce sont ainsi 45 élèves qui ont écrit 14 textes. Le projet leur fut présenté le 19 ou le 20 mars selon les emplois du temps des classes, les textes devant être rendus le 25 mars au plus tard.
  • répartition en 14 équipes (au moins un élève de chaque établissement par équipe) ;
  • les équipes écrivirent donc leur texte sur la page de l’Etherpad qui leur était dédiée dans le but d’une publication fragmentée et courte.

Consignes

* écrire un texte en 10 tweets, sachant qu’un tweet ne peut excéder 140 caractères et que chaque tweet devait comprendre la balise #SILF12 (acronyme de Semaine Internationale de La Francophonie 2012) affectée du numéro de l’équipe afin que les lecteurs internautes puissent suivre les textes des différentes équipes en cliquant sur cette balise.

* employer obligatoirement une liste de dix mots : nous nous sommes inspirés du concours « Dis-moi dix mots » et avons cherché dix mots qui reflétaient le langage ou les tics de langage, ou la réalité géographique, de nos élèves ; le texte devait ainsi comporter cinq mots plutôt employés en France et cinq mots plutôt employés au Québec. Ceux-ci furent donc : Banc de neige ; Amancher ; Abriller ; Baboune ; Jambette (Québec) - Vieux (sens négatif) ; Guinguette ; Foisonnant ; Intermodal ; Trop (France).

Évaluation et bilan

 Deux textes furent élus par tous les élèves et diffusés sur le réseau social en ligne Twitter.

Histoire 1
Histoire 6

 Utiliser Twitter et rencontrer des collègues d’ailleurs (hors de l’établissement, de l’académie, de la métropole et du pays) est un moyen assez simple pour tisser des liens et construire des projets. Ce peut être l’occasion ensuite de construire un projet eTwinning.

 Les élèves ont réellement eu plaisir à écrire ces textes, à découvrir des mots et à échanger avec leurs homologues canadiens. Certains ont profité de l’occasion pour échanger sur leurs pays respectifs. Les négociations ont parfois été vives entre les participants car tous avaient à coeur d’écrire un beau texte (les négociations ont donc beaucoup porté sur ce qu’était un beau texte, le beau étant souvent bizarre...pour eux aussi !).

 Les textes ont été écrits de différentes façons selon les équipes : soit en même temps quand les élèves parvenaient à être en synchronie, soit de façon décalée, avec parfois l’inconvénient que ceux qui n’avaient pas écrit se rangent au texte écrit plutôt que d’écrire aussi.

 Il fut nécessaire d’accompagner l’écriture de ces textes soit pendant le temps de classe soit en-dehors, ce qu’a notamment fait Sylvain Bérubé en rappelant ou explicitant de nouveau les consignes, en donnant des conseils ou des idées d’écriture.

Limites et perspectives

 La première limite fut le décalage horaire qui a empêché les élèves français de travailler en même temps avec les Québecois tandis que ceux-ci en avaient l’occasion puisque le travail se fit sur le temps de classe ; le décalage temporel a été difficile à gérer pour les Français. Il faudra, dans un prochain projet, veiller à mettre en place un protocole pour faire de cette asynchronie une contrainte d’écriture fructueuse et non paralysante.

 Une autre limite fut le manque de temps : les idées naissent souvent de rencontres et de discussions sur Twitter. Nous avons tenu avec ces deux enseignants à faire le projet malgré le peu de temps imparti car il nous semblait particulièrement intéressant de marquer cette semaine dédiée à la francophonie.

 D’autres projets envisagés : la collaboration en ligne (qui a même débouché sur la venue d’Annie Côté en classe via l’outil de vidéo-conférence !) a réellement été un facteur motivant et stimulant car elle permit d’écrire avec des élèves étudiant le français mais dans des conditions différentes, et de publier en direct ou très rapidement les textes pour les faire lire aux réseaux des comptes Twitter des classes et/ou des enseignants. Annie Côté organise avec Jean-Yves Fréchette et l’Institut de Twittérature Comparée un festival en octobre 2012 (le site) auquel nous allons participer.

Bibliositographie

  • Articles et ressources parus sur Twitter et l’enseignement du français (projets d’Annie Côté) :
  1. Twitter sur les bancs d’école (La Presse) : l’article.
  2. Des devoirs de français sur Twitter (Le Café Pédagogique) : l’article.
  3. Entrevues avec Annie Côté : Twitter et l’enseignement du français au secondaire, l’article ; une vidéo à la télévision canadienne (ici) ; un autre article ici.
  • Articles parus sur le projet #SILF12
  1. Le projet raconté par Sylvain Bérubé : l’article.
  2. Le projet présenté par Sylvain Bérubé aux élèves : ici.
  • Des professeurs de Lettres sur Twitter
  1. Une liste non exhaustive de comptes se trouve ici.
  2. Le site Twittez-vous créé et géré par deux professeurs documentalistes incite les personnes ayant un compte sur Twitter à se référencer ici. On pourra ainsi trouver nombre d’acteurs du monde éducatif.
  • eTwinning
  1. Article sur ce site : ici.
  2. Le site dédié dans l’Académie de Versailles : ici.
  • Etherpad du CRDP de l’académie de Versailles : ici.

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