1) Les objectifs du projet.
Il s’agissait d’une « expérimentation pédagogique », c’est-à-dire d’un projet test pour la réforme de la section STG à venir, qui articulait quatre matières : l’histoire-géographie, la philosophie, l’EPS et le français. Le but était de revaloriser les matières générales dans une filière où ces dernières sont souvent considérées comme secondaires, étant donné leur faible coefficient aux épreuves du baccalauréat. Nous avons choisi de travailler sur un thème transversal – le corps- afin de permettre aux élèves d’améliorer leur expression aussi bien orale qu’écrite.
Remarque préliminaire : La 1ere qui était pressentie pour bénéficier de cette expérimentation s’est trouvée être une classe « difficile » : Des conflits au sein de la classe et un groupe d’élèves agités, ayant clairement des difficultés à respecter les contraintes du travail scolaire, expliquent en partie l’ambiance parfois tendue qui régnait dans le groupe. De plus les élèves n’ont pas accueilli favorablement le projet lorsqu’il leur a été présenté pour deux raisons qu’ils ont régulièrement invoquées pour justifier leurs réticences face au travail. La première était que le projet représentait une heure de cours hebdomadaire supplémentaire dans leur emploi du temps. La seconde était qu’ils n’étaient pas volontaires pour cette expérimentation qui leur a été « imposée ». Ces a priori ont constamment fait obstacle à la mise en œuvre du projet puisque nous avons dû expliquer à plusieurs reprises l’intérêt de ce travail qui n’apparaissait pas aux élèves.
2) Le développement du projet :
Notre projet a connu plusieurs phases.
- Un premier temps de questionnement lié à la notion. L’idée était de partir des représentations des élèves afin de dégager des pistes de réflexion. Quatre grands thèmes ont ainsi été vus et repris dans une perspective philosophique. Ce premier temps s’est conclu par une visite au musée du quai Branly sur le thème du projet. (septembre -octobre)
- Dans un deuxième temps, nous avons travaillé autour du spectacle Babel, mis en scène par Elise Chateuret à la Courneuve. Les jeunes comédiens et la metteur en scène sont ainsi venus rencontrer les élèves dans la classe et ce spectacle a donné lieu à une analyse de la représentation. (novembre- décembre)
- Une perspective de mise en situation des élèves s’est alors imposée à nous pour leur proposer une première réalisation. Dans des ateliers théâtre (travail d’improvisation notamment), les élèves ont expérimenté une première approche de l’art dramatique, sur laquelle ils sont revenus dans un atelier d’écriture. (janvier- février) et dans un atelier d’écriture à partir de ces improvisations. Une séance d’analyse des travaux d’écriture a ensuite été proposée.
- Il a nous semblé enfin judicieux et nécessaire de faire appel à un intervenant extérieur qui complétait cette perspective afin de proposer une réalisation finale constituée par la mise en scène de courts extraits de pièces de théâtre étudiées pour l’oral de français. L’intervenant a pris en charge un demi groupe d’élèves sur deux heures consécutives et a mis en scène un des textes présentés à l’oral de français, choisi par les élèves. Chaque demi groupe a travaillé pendant deux semaines, en alternance avec deux heures de français, avec le metteur en scène avant de présenter sa mise en scène à l’autre moitié de la classe. Cette dernière étape a permis de d’étudier les textes vus en classe d’une façon détournée, ludique et porteuse. Les élèves ont réécrit certains textes, ce qui leur a permis de se les approprier. Il faut signaler que lors de la représentation finale, huit élèves environ ont refusé de participer à la représentation. Tous étaient en revanche curieux du résultat produit.
3) Contenus pédagogiques en lien avec le projet dans chaque matière :
Une remarque générale s’impose d’abord : Dans le projet initial, les contenus disciplinaires abordés dans le projet étaient nombreux ainsi que les occasions de croiser les disciplines. Or il n’a pas été possible d’aller au bout de cette démarche. En effet cela supposait d’organiser l’ensemble des progressions disciplinaires en fonction du projet, et d’autres contraintes se sont imposées (respect des progressions définies par les conseils d’enseignement, rythme des cours, etc). Par ailleurs, il aurait fallu pour cela que les questions sur le corps abordées en début d’année, qui donnaient la possibilité de faire des « ponts » entre les disciplines soient reprises ensuite, ce qui n’a pas été possible, pour les raisons indiquées ci-dessus.
En philosophie : Une découverte de la matière, comme questionnement sur l’âme et le corps, les correspondances entre passions, sensations et émotions, la mort, l’existence, l’être et l’apparaître, la vertu du rire. Ces questions ont été élaborées, problématisées. Certains éléments de doctrines philosophiques ont ensuite été abordées, dont la question du dualisme (Platon, Descartes), et celle de ressort comique de la mécanisation des corps (Bergson), sans toutefois passer par la lecture de textes philosophique.
En français : Le professeur a choisi des séquences sur le théâtre en rapport avec le thème du corps puisque la première s’articulait autour de la représentation de la métamorphose sur scène (textes de Ionesco, Rhinocéros ou la transformation de l’homme civilisé en animal et de Cocteau, La machine infernale ou la nouvelle « vision » d’Œdipe devenu aveugle) et la seconde autour de la question du corps social à travers l’œuvre de Marivaux, Le Jeu de l’Amour et du hasard.
L’objet d’étude « Le personnage de roman du 16ème au 21ème siècle » a abordé la question de la représentation de la courtisane dans plusieurs œuvres romanesques et a fait l’objet d’une synthèse sur le rapport avec le corps. L’étude de L’Etranger de Camus a également permis un retour sur les sensations et la posture argumentative (étude du procès de Meursault mis en relation avec le documentaire de Depardon, 10ème chambre)
4) Propositions pour améliorer le dispositif :
- Répartir autrement les heures consacrées au projet : Consacrer le premier trimestre à l’élaboration du projet à travers les séquences disciplinaires afin de faire surgir l’intérêt du thème et du travail interdisciplinaire. Réserver les heures de projet aux deuxième et troisième trimestres avec des blocs horaires de deux heures. Cela semble absolument nécessaire pour faire adhérer une classe à un projet de ce type, condition sine qua non de sa réussite et de son efficacité.
- Le travail en interdisciplinarité exige, pour les professeurs un temps important de concertation et d’élaboration collective du contenu. En effet il faut éviter la simple juxtaposition des contenus disciplinaires. En conséquence, pour favoriser le travail en interdisciplinarité, il faudrait peut-être se concentrer sur l’articulation de deux ou trois disciplines (par exemple EPS/ français/ histoire, ou EPS / philo/ français, voire histoire / français).
- Par ailleurs il faut prévoir un temps de concertation plus important, ce qui peut se faire au cours du premier trimestre.
Que tous les professeurs investis dans le projet aient la classe en cours.
Amélie Beaufour, professeur de lettres modernes au lycée Jean-Jacques Rousseau de Sarcelles, pour l’ensemble de l’équipe pédagogique concernée : Adrien Behra et Yvan Coutellec en EPS, Nathalie Héraut en Histoire-Géographie et Cécile Victorri en Philosophie.