De l’élève consommateur à l’élève acteur : travail en équipe dans une classe de 2nde

, par Une équipe de professeurs du lycée Marcel Pagnol, Athis-Mons

Présentation

A l’origine du projet

 La volonté de quelques professeurs de travailler ensemble à partir de convictions communes ;
 Le constat que les élèves de seconde sont de plus en plus difficiles, du fait qu’ils ont de plus en plus de mal à s’adapter aux exigences du travail en lycée ;
 Le désir de ne pas rester inactifs face à ce constat ;
 Le succès rencontré il y a deux ans par les ateliers d’aide à l’apprentissage mis en place par deux collègues de l’équipe, renforçant l’idée que les élèves ont des besoins nouveaux et qu’ils sont en fait demandeurs.

Mise en oeuvre pratique

 Le lycée Marcel Pagnol à Athis-Mons est un établissement « standard », ni facile ni particulièrement difficile.
 Classe concernée : une seconde comme les autres de 30 élèves, anglais LV1 sans option latin.
 Fonctionnement de l’équipe : les élèves ont leur emploi du temps normal, comme les autres classes ;
les professeurs ont une heure de concertation hebdomadaire et se voient également en dehors du lycée lorsque c’est nécessaire.

Objectifs

Mise en œuvre pédagogique

Les professeurs parlent le même langage

 Ils montrent que leurs attentes sont semblables
 Essai d’harmonisation des « remarques » sur les copies
 Travail sur le vocabulaire des consignes d’exercices

Un outil commun au service de plusieurs objectifs : le cahier de brouillon

 celui-ci sert à toutes les matières, les élèves doivent toujours l’avoir sur eux et le mettre sur leur table au début du cours ;
 c’est un lieu où s’effectue la construction du savoir :

  • on y a le droit de se tromper, de raturer : faire des erreurs est une étape nécessaire ; elles doivent être visibles pour pouvoir être retravaillées ;
  • il est utilisé lorsque la restitution immédiate est impossible (il permet un temps de réflexion, une aide au travail mental, et c’est une zone de passage entre l’oral et l’écrit) ; les professeurs montrent ainsi qu’ils n’attendent pas la formulation spontanée d’une réponse parfaite !

 il permet de respecter le rythme de chaque élève : dans les moments de travail au brouillon, certains vont produire beaucoup, d’autres moins, mais tous sont actifs ;
 il permet à chaque élève d’avoir quelque chose à dire lors de la mise en commun collective des suggestions de chacun : la « bonne parole » n’est plus l’apanage des seuls « bons élèves ».

Ainsi, chacun trouve sa place et le savoir est construit par l’ensemble du groupe à partir des contributions individuelles, il ne « tombe » pas « brut » du professeur.

La construction des savoirs

 rôle du cahier de brouillon : voir plus haut ;
 susciter des réactions spontanées, qui peuvent être des questions, des impressions...
 partir de leurs représentations et prénotions.

Travail sur le statut de l’erreur : faire des erreurs n’est pas la fin du monde et cela permet de progresser

 rôle du cahier de brouillon : voir ci-dessus ;
 importance accordée aux temps d’auto-correction des devoirs :

  • celle-ci s’effectue sur le temps de cours et non à la maison ;
  • chaque élève doit remplir une fiche d’auto-correction où il analyse ses erreurs en les expliquant lui-même afin de ne plus les refaire (avec l’aide du professeur, du manuel, du cours ou d’un autre élève ayant déjà fini sa fiche) ;

 en français, droit de réécrire sa copie, le nouveau devoir ainsi obtenu rentrant dans l’évaluation ; pour donner de la distance face aux erreurs, le corrigé d’un devoir peut aussi se faire sous la forme du corrigé par le groupe, en classe, d’une copie « fabriquée » par le professeur et rassemblant les principales erreurs que celui-ci a trouvées en corrigeant : c’est déculpabilisant, ludique et incite à se relire.

Désacraliser la parole du professeur et valoriser la parole de chaque élève, pour lui-même et vis-à-vis du groupe

 rôle du cahier de brouillon : voir plus haut ;
 en langues, chaque élève est responsable auprès du groupe d’un point de grammaire différent (choisi par l’enseignant parmi les points que l’élève a signalés en début d’année comme acquis) : il doit faire un exposé où il explique aux autres les règles à retenir, produire une fiche qui est rangée dans un classeur collectif appartenant à la classe, et il est élève ressource pour les autres sur ce point.
 lors d’une intervention erronée d’un élève, le professeur fait d’abord appel au groupe pour rectifier ; cela favorise en outre l’écoute active des élèves.
 réduire au minimum ce que le professeur fait « copier dans le cahier » comme étant la seule chose « bonne à apprendre ». Il faudra retenir ce qui aura été élaboré par le groupe ou individuellement.

Développer l’entraide : élèves « ressources » : voir plus haut

 lors des corrections de devoirs, les élèves les plus rapides aident ensuite les autres (voir plus haut) : il se constitue ainsi des « binômes », qui peuvent être mis également en place lors d’exercices, et qui ne sont pas forcément les mêmes d’une matière à l’autre ;
 recours au « pair-work » et aux travaux de groupes.

Bilan en fin de second trimestre

Points positifs

 Pour les professeurs : notre travail se trouve facilité par une confiance mutuelle qui nous permet de sortir de l’isolement, de mettre en commun nos expériences, nos « trouvailles », d’avouer nos échecs, de trouver des réponses collectives face à des problèmes communs concernant un élève ou la classe, aussi bien au plan du travail que du comportement.
 Le travail d’équipe a permis au cours des premières semaines de canaliser des comportements de déscolarisation, voire de déviance.
 Auprès des parents, nous bénéficions d’une crédibilité renforcée.
 Les élèves apprécient la cohérence de l’équipe et la confiance que nous avons en eux ; ils nous disent se sentir sécurisés. Dépassant peu à peu des attitudes de passivité ou d’incompréhension vis-à-vis des travaux demandés, ils apprécient, quoique lentement, l’initiative ou la responsabilisation, le travail sur le statut de l’erreur, l’outil cahier de brouillon commun, l’auto-correction en classe, le travail en « pair-work », l’entraide qu’ils peuvent s’apporter. La classe est d’ailleurs très soudée.

Points négatifs

 Le temps de concertation manque : notre heure hebdomadaire a été jusqu’en janvier essentiellement consacrée à la régulation du groupe classe et pas assez à la mise en commun de nos expériences.
 Nous nous heurtons malgré tout à la passivité des élèves , à la « résignation acquise » (il leur est difficile de changer leurs représentations, leurs habitudes) et nous n’avons pas réussi à convaincre les élèves qu’il était indispensable de travailler régulièrement et d’envisager leur travail sur le long terme.
 Difficulté de développer l’écoute mutuelle, de faire fonctionner le « groupe classe » en interaction (les cours doivent être très structurés pour que les élèves soient actifs : sommes-nous alors sur le chemin de l’autonomie ?).
 L’évaluation de petits travaux, effectuée pour valoriser des efforts fournis, a cependant un effet pervers : elle aurait tendance à renforcer le travail pour la note et ne contribuerait pas à redonner du sens au travail scolaire.
 Nous n’avons pas réussi à affiner suffisamment notre connaissance des difficultés de chaque élève. Il nous aurait fallu mettre en place des entretiens individuels et du tutorat en dehors des heures de cours.

Perspectives

 Maintenir, dans nos pratiques, ce qui s’est avéré positif.
 Mettre en place des entretiens individuels menés par des professeurs pour repérer très tôt les difficultés et le mode de fonctionnement mental de certains élèves afin de mieux les aider.
 Mettre en place un tutorat entre élèves, où certains pourront en aider d’autres là où ils sont à l’aise (à charge de revanche dans une autre matière).
 Mettre en place des groupes de suivi de 5 ou 6 élèves par professeur, pour les aider à mieux s’organiser dans leur travail, à faire le point.
 Pour rendre les élèves plus actifs, développer des projets interdisciplinaires ou des activités extra-scolaires.

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