LE LIEU DE L’ÉCRITURE
Le lieu de l’écriture : collège ou maison dépend de la situation des élèves auxquels on s’adresse mais tout autant, bien entendu, de la situation d’écriture elle-même.
Le cas des élèves qui n’ont pas d’aide possible à la maison
Travail en classe et aide individualisée
Ayant travaillé pendant de nombreuses années dans des collèges dans lesquels les élèves étaient peu encadrés à la maison, je me suis rendu compte qu’il y avait intérêt à ce que la plupart des exercices écrits se fassent en classe. Ceci a pour avantage de permettre un travail « sérieux » sur l’écrit proposé ainsi qu’un suivi du professeur ou d’un élève « tuteur ». En effet, pour un élève que les parents ne peuvent aider, le rôle du professeur peut se concevoir comme celui d’un médiateur qui remplit le rôle qu’aurait un parent dont le niveau d’études serait suffisant pour qu’il puisse offrir une aide à son enfant. Dans la classe, une aide individualisée peut être ainsi envisagée. On peut aussi mettre les élèves par deux en usant des niveaux de compétence différents.
Travail en classe et démarche progressive vers l’autonomie de l’élève et la responsabilisation de l’écriture
Un fait me semble certain : plutôt qu’à se lamenter sur l’absence de travail à la maison, il vaut toujours mieux se poser la question du pourquoi et tenter d’y apporter des solutions. Faire en sorte que les élèves progressent en travaillant exclusivement en classe est bien préférable à une situation de blocage dans laquelle il n’y a pas de progression possible. Si l’on accepte pendant un certain temps le travail en classe avec l’aide, les explications et le dialogue avec le professeur, les élèves peuvent parvenir à une certaine autonomie dans l’écriture et le travail chez soi deviendra, au moins partiellement, possible. Dans les endroits où les parents sont peu présents ou peu aptes à aider leurs enfants, ce n’est que progressivement que l’on peut conduire les élèves à une forme d’autonomie ou de responsabilisation du travail d’écriture. Tout cela est à adapter en fonction de la classe et de son évolution.
Le collège, lieu d’explications, de socialisation, de distanciation de l’écriture
Les explications
– Le temps de l’appropriation des consignes
Dans tous les cas, le travail d’écriture comprend le temps nécessaire à la mise en écriture. Qu’il s’agisse d’un travail de type « atelier créatif » ou d’un travail plus dirigé et normé, le temps de l’appropriation de la / des « consignes » ou de la « proposition d’écriture » apparaît nécessaire. L’expérience prouve qu’un exercice improvisé d’un quart d’heure pour finir le cours est rarement productif (dans toutes les implications du terme)...
Le temps de l’appropriation n’est pas seulement celui de l’explicitation des consignes, de l’écriture des divers conseils, du vocabulaire, des structures syntaxiques que l’on se propose de voir mis en oeuvre dans un devoir donné.
L’expérience prouve que, passé ce premier temps de questions / réponses autour d’un sujet, passée aussi la prise de notes organisée des réponses, le questionnement des élèves est rarement terminé. Le temps du silence lors du passage à l’écriture doit, bien évidemment être institué. Certains élèves laisseront leur feuille blanche et il faudra retourner vers eux. Mais faire l’économie de ce temps serait dommageable car c’est malgré tout toujours un temps de réflexion.
– De la préparation de l’écriture à l’écriture proprement dite
Le premier temps de concentration est très souvent suivi d’un questionnement très fourni. Cela s’explique de manière très simple : tant que le travail concret d’écriture n’est pas encore commencé, pour l’élève la préparation en reste encore au stade de l’abstration. La plupart des élèves ne prennent conscience de l’intérêt de la préparation qu’au moment où ils doivent réellement mettre en œuvre ce dont on a parlé.
Le hiatus entre la préparation et l’écriture proprement dite doit être souvent conçue comme un second temps d’appropriation, une nouvelle phase d’explication : celles des questions concrètes qui se posent ax élèves lors de leur propre mise à l’écriture. Très souvent, alors que l’on croit avoir tout expliqué, ils disent et répètent : « je n’ai pas compris » ou « je ne sais pas ce qu’il faut écrire ». Cette phase de ré-explication que j’appelle la ré-explication concrète et (souvent) individuelle est un temps à part entière du travail d’écriture. Il permet de calmer les inquiétudes, de lever les incompréhensions, de rapprocher les élèves de l’objet de leur travail. La classe est un lieu privilégé pour cela, permettant au professeur de jouer son rôle de recours et de ressource. Elle est aussi le lieu qui permet de se rendre compte que nos « préparations » ne sont pas miraculeuses et qu’elles laissent très souvent des problèmes auxquels nous n’avions pas pensé et qui sont ceux sur lesquels butent beaucoup d’enfants.
– Les pré-requis de l’écriture
La quantité des pré-requis d’une écriture est rarement envisageable. On cherche à simplifier des opérations qui sont d’une très grande complexité, on fixe des objectifs limités à un type d’acquisitions... Il faut bien penser que, quel que soit le cadrage envisagé, quelles que soient les limites des objectifs visés par tel ou tel exercice, rarement ils pourront prendre en compte tout ce qui est en jeu dans ce qui est proposé, si ce qui est en jeu comporte un enjeu... Ecrire, c’est très, très complexe et c’est, d’une certaine façon, cette complexité devant laquelle nous mettons régulièrement nos élèves et que nous ne voyons pas toujours car nous la maîtrisons bien plus qu’eux, « naturellement ».
La socialisation / la distanciation
– Temps d’écriture et temps de lecture
Pour faciliter l’écriture, choisir le collège comme lieu de travail permet de fixer un temps d’écriture puis un temps de lecture. Et cela est d’une très grande utilité. Le passage par l’oralisation des textes m’est apparu de plus en plus comme une nécessité, dans les situations d’atelier « ouvert » comme dans celui d’une écriture plus « cadrée ». Précédemment, la phase d’explication est pour le professeur un moyen de prendre conscience des questions et problèmes qui se posent aux élèves. Corrélativement, elle est un moyen pour les élèves de prendre conscience progressivement des attendus du professeur. La lecture permet le même type d’interactions.
– Lecture à voix haute et retour du professeur
La lecture à haute voix est un très bon moyen pour le professeur de se rendre compte des réussites et des problèmes rencontrés par les élèves. Et il est très important qu’il verbalise les deux aspects auprès de la classe. C’est le « retour » du professeur qui peut permettre à la fois de ne pas se décourager, de prendre conscience de ce qu’il convient de conserver ou de revoir.
– Lecture à voix haute et socialisation
Dans le cadre d’un atelier d’écriture collective ou individuelle, c’est un bon moyen de socialisation, d’émulation, de mise en valeur. Silence et respect sont assez faciles à mettre en place, même dans le cadre de classes qui ne sont pas « faciles ».
– Lecture à voix haute et distanciation
C’est aussi un bon moyen de mise à distance, de prise de conscience de son texte : est-ce que mon texte « tient » si je le lis à la classe ? Telle est la question que chacun est conduit à se poser.
– Comment instituer la lecture à haute voix ?
Bien sûr, la confiance que nécessite le passage à l’oral doit se mettre en place. Au début, il ne faut pas forcer les choses ; les élèves acceptent petit à petit de livrer leur écrit au groupe. Progressivement, l’intérêt de l’exercice de lecture apparaît comme une nécessité. Dans tous les cas, si un élève est totalement réfractaire à la lecture, il ne faut pas le forcer. Le passage par l’oral / le corps doit être considéré dans toute sa complexité, l’adolescent ou le pré-adolescent dans toute sa possible fragilité dans son rapport à l’autre, au corps, à ses difficultés.
D’autres stratégies propres à la classe peuvent être mises en place pour faciliter socialisation et/ ou distanciation.
LES ÉTAPES DE L’ÉCRITURE
Ecrire en plusieurs étapes : le suivi de l’écriture au collège
Importance du suivi de l’écriture des élèves au collège
Le suivi de l’écriture des élèves au collège peut se faire de différentes mainères, chacune ayant ses particularités. Le plus important tient précisément dans cette notion de suivi qui instaure un questionnement permanent, condition d’une autonomie possible.
Comment mettre en place le suivi de l’écriture ?
Dans les classes très faibles, où l’aide est très importante, on peut choisir de travailler en se donnant des moments d’écriture « surveillés » par le professeur qui donne des conseils individualisés aux élèves, par exemple en instaurant une table à laquelle les élèves viennent le trouver lorsqu’ils rencontrent des difficultés. L’idée ici est encore de jouer le rôle du professeur en même temps que celui d’un médiateur.
Dans d’autres classes, on peut simplement faire commencer l’écriture en classe, voir comment elle évolue puis laisser poursuivre à la maison avant de passer à une lecture à haute voix qui permet de donner des conseils.
Les étapes de l’écriture
La première version, c’est-à-dire le brouillon en fin d’élaboration, est d’abord lue par une partie des élèves. J’appelle la seconde version celle qui, dans tous les cas, doit être rendu au professeur.
Améliorer le brouillon par une lecture à haute voix qui permet :
D’élaborer avec les élèves une grille d’évaluation
Avoir lu préalablement les textes au brouillon permet d’instaurer une grille d’évaluation qui tienne compte des réussites, des échecs, des erreurs commises en cours d’élaboration du brouillon. Etablir ainsi une grille d’évaluation a posteriori permet d’éviter de présenter aux élèves des critères qu’ils concevraient comme abstraits puisqu’ils ne renverraient pas à ce qui a déjà été écrit par eux.
De rendre l’élève sensible aux problèmes de langue
Ajoutons que la lecture à haute voix ou l’analyse d’un / de plusieurs brouillons au rétroprojecteur peut rendre sensible une classe entière non seulement aux problèmes de langue qui se posent spécifiquement pour le type d’écrit demandé mais aussi à des questions plus fines d’adéquation entre ce que l’on veut exprimer et ce qui est, de fait, exprimé et que l’élève juge pour une raison ou une autre insatisfaisant. Ceci répond aussi à l’une des remarques les plus souvent entendues chez les élèves : je voudrais bien dire telle ou telle chose mais je ne sais pas comment faire. La résolution alors est souvent de deux ordres : un problème d’expression réel se pose qu’il faut résoudre (par exemple la suppression des répétitions) ; mais le plus souvent il s’agit d’un problème d’adéquation entre l’idée que l’on a en tête et l’idée qui se trouve sur le papier. Ce second problème est souvent très intéressant car il permet souvent la discussion sur un problème d’écriture qui engage la question du rapport entre le fond et la forme, quelle que soit la manière dont cette question se joue. Il y a souvent des solutions simples (souvent un vocabulaire trop pauvre ou une tournure qui échappe...) mais là n’est pas le problème. Ce qui est important, c’est ce qui se joue à cet endroit-là pour l’élève dans son rapport à l’écriture. Qu’il s’habitue à ne pas se satisfaire de ce qui ne le satisfait pas, qu’il s’habitue à chercher des solutions, même « approchantes ». C’est pourquoi là encore l’important me semble être l’accompagnement. Permettre de rentrer dans la complexité et l’engagement de l’acte d’écrire.
De questionner l’écriture au collège
L’écriture pourra être questionnée pour soi uniquement dans la mesure où le professeur est là pour ouvrir le questionnement. Questionner l’écriture « de soi à soi » n’est donné qu’à un nombre extrêmement restreint d’élèves qui ont déjà l’habitude de donner du sens à un écrit personnel. Et, même pour ceux qui ont déjà cette habitude, il est tout aussi important que le professeur fasse exister cette part de questionnement à l’école car c’est cela même, me semble-t-il, qui rend l’écriture vivante des « deux côtés à la fois » : pour soi et pour autrui.
Travailler la réécriture
Les difficultés de la réécriture
On entend souvent dire que la réécriture est difficile, voire impossible pour les élèves, spécialeemnt ceux pour qui l’écriture est problématique, bien sûr.
Réécrire, de fait, fait appel à de multiples opérations possibles. D’où la difficulté de réaliser quelque chose que l’on désigne sous le signe de l’unique alors que cela devrait être désigné sous le signe de la multiplicité. En fait, on peut distinguer plusieurs éléments possibles de réécriture : la réécriture syntaxique et orthographique, la réécriture stylistique (plus fine que les précédentes), la réécriture de cohérence textuelle et tant d’autres... Là encore, c’est la complexité de l’acte d’écrire que l’on est conduit à considérer.
Réécriture et progression des compétences de l’élève en écriture
La correction de rédaction qui reprend les errers les plus communément commises si elle est associée à des exercices de remédiation peut avoir une efficacité. Cependant, l’expérience prouve que c’est la (re)confrontation à son propre écrit qui permet le plus sûrement à l’élève de progresser. La progression en écriture ne passe que par la mise en place d’un véritable (ré)investissement individuel.
Ajoutons que réécrire plus juste orthographiquement et syntaxiquement est possible grâce à des notations en marge de la copie jusqu’à un certain seuil seulement. Si la copie est saturée d’annotations cela est souvent le signe que l’élève a tant de problèmes avec la maîtrise de la langue qu’il ne sert à rien d’attendre qu’il puisse régler en même temps tous les problèmes qui se posent à lui. Plusieurs possibilités s’offrent alors au professeur : choisir de faire corriger à l’élève un seul type d’erreurs ; corrélativement, en corriger lui-même un certain nombre ; choisir de faire corriger à l’élève dix lignes uniquement (au moins) de la totalité de la copie : ceci permet de conserver intacte la concentration et d’en retirer une forme de satisfaction... Dans tous les cas, éviter un vocabulaire trop technique qui s’avère souvent inopérant. Préférer la parole et l’explication. Pour les élèves « moyens », souvent la reprise systématique des erreurs permet une véritable progression.
La réécriture qui met en jeu la cohérence textuelle demande souvent tout à la fois une explication écrite et une explication individuelle et orale.
Le temps nécessaire à la réécriture
Enfin, pour parvenir à des améliorations plus « fines », il faut compter avec le temps. Réécrire n’est pas seulement corriger, c’est aussi réinvestir différemment ce qui a été écrit, et cela demande un déplacement par rapport à ce qui a été écrit. Et ce n’est pas simple... Le déplacement n’a pas lieu dans une forme d’immédiatement à l’écrit ou alors exceptionnellement. Avant de concevoir les points possibles de développements, de précisitons, de changements, un recul est nécessaire : l’effet miroir existe pour l’adulte qui écrit, alors pourquoi n’existerait-il pas pour l’adolescent ? Le problème me semble identique dans les deux cas et il se complexifie, bien évidemment, parce que l’adolescent tient à son texte même s’il le sait « fautif » de bien des côtés au regard de ce qui lui est demandé et des critères sur lesquels il est jugé.
On a bien souvent l’occasion de constater qu’un élève à qui on demande de lire son texte, parfois s’arrête, se rendant compte subitement que « cela ne va pas ». Mais, si on « laissait poser » un texte au moins une semaine, avant d’en demander la lecture à voix haute, l’effet serait encore plus important. Il y a alors déconnexion des circonstances dans lesquelles on a écrit, et souvent, acceptation de reprise du texte. Cette opération n’est pas du tout la même que celle qui consiste à retravailler une erreur sur un devoir déjà noté car l’élève sait ce que l’erreur lui a « coûté » et cela peut être une entrave à l’écoute. Psychologiement, avoir le soulagement de se corriger avant d’être évalué, c’est très important. Le processus est différent et ne renvoie pas, au final, à la même image de soi ni du travail qui se fait ou qui est fait.
Donner de l’importance au brouillon
Bien sûr, on peut montrer des bouillons d’écrivains... mais cela n’a que peu d’impact si l’élève ne sais pas lui-même gérer son brouillon et s’il n’en mesure pas l’importance. Donner de l’importance au brouillon passe donc par toute une série de procédures simples :
– Le lieu du brouillon (quel qu’il soit) bien que, personnellement, je préfère qu’il ne soit pas déconnecté du lieu où le cours est pris... le brouillon et le cours ’est pas le « sale » versus « le propre », ce sont des lieux de travail et d’exploration différents
– La discussion systématiquement organisée autour du brouillon et non uniquement autour de l’objet terminé
– Rendre lisible l’évaluation en fonctin de ce qui a été constaté dans les brouillons
– Eventuellement le refus de la gome, de l’effaceur et du blanc : apprendre que ce qui est barré peut resservir... Et là encore l’impact psychologique est important : écrire puis barrer parce que l’on n’est pas satisfait de ce qui est écrit n’a pas le même effet « intérieur » qu’une page sur laquelle ne subsiste aucune trace du travail.
ORGANISER DES EXERCICES D’ÉCRITURE BREFS ET RÉGULIERS : L’EXEMPLE DE L’AUTOBIOGRAPHIE
Les problèmes d’écriture spécifiques à l’autobiographie
L’autobiographie pose des problèmes d’écriture spécifiques car elle touche nécessairement à l’intime. Nul ne peut se garder qu’un texte révèle le problème majeur d’un élève, qu’il s’agira alors de prendre en compte, éventuellement, hors du cadre du cours. Mais nous pouvons faire en sorte de concevoir des propositions d’écriture ouvertes au sens où elles permettent le « détour » si l’élève le souhaite. C’est dans cet esprit qu’on été pensées les propositions d’écriture qui suivent.
Tous les « petits » textes issus de ces séances d’atelier seront regroupées dans un « dossier de mémoire » et évalués, dans le sens d’une valorisation de la qualité de l’expression et de l’investissement dans le travail. Mais, là encore, les critères de l’évaluation suivent ce qui a été entendu lors des lectures, point d’appui de ce qui peut être fixé comme objectifs aux élèves, sans créer de dommages à l’ouverture des propositions.
Proposition d’écriture n°1 : Ecrire les dix premières lignes d’une autobiographie, réelle ou fictive
– Consignes :
Il s’agit de demander aux élèves d’écrire les dix premières lignes de leur autobiographie, réelle ou fictive.
– Objectifs :
Cette proposition permet d’introduire à l’étude des incipits. Elle réserve en effet souvent des surprises et en général, on y retrouve des formes et des contenus qui sont assimilables à des autobiographies déjà existantes, en ce sens, cette proposition est pleinement préparatoire à la lecture.
Proposition d’écriture n°2 : Ecrire un autoportrait « voilé »
– Consignes :
Il s’agit de faire écrire un autoportrait « voilé ». Pour cela, demander aux élèves d’écrire les lettres de leur prénom à l’envers puis leur demander d’écrire à la première personne le portrait de la personne qui porterait ce prénom « à l’envers ».
– Objectifs :
La force de cette proposition tient avant tout en cela qu’elle permet d’écrire des autoportraits dont la cohérence est souvent frappante parce qu’elle part d’un nom imaginaire et très inhabituel. La puissance poétique du langage apparaît ici comme une évidence aux élèves, avec tous les commentaires que l’on peut penser sur ce thème.
Proposition d’écriture n°3 : Ecrire un journal de bord
– Consignes :
Il s’agit de faire écrire un journal de bord sur une semaine. Des exemples peuvent être donnés et privilégieront des journaux « non intimes » car demander l’écriture d’un journal intime tient évidemment de l’absurdité. Des extraits du journal de Jules Renard ou de Kafka, des Carnets de Louis Guilloux... peuvent être lus, en préparation au travail. Là, l’écriture se fait hors temps scolaire.
– Objectifs :
Cette proposition oblige l’élève à se placer sur un autre terrain que sur celui de l’introspection. Comment donner une qualité littéraire à ce qui relève du champ du « vécu » devient alors une question que l’on peut leur / se poser et qui semble aujourd’hui primordiale, étant donné l’envahissement du champ littéraire par le psychologisme...
Proposition d’écriture n°4 : Croiser histoire personnelle et histoire contemporaine
– Consignes :
Cette proposition a pour point de départ le livre de G. Pérec : W. Il s’agit de penser à un croisement possible de son histoire personnelle avec l’histoire contemporaine.
– Objectifs :
Là encore, cette propsition est une manière de faire en sorte que les élèves pensent autrement leur rapport aux événements qui défilent sur les ondes ou en images. C’est aussi une proposition, bien sûr, plus ouverte sur une matière personnelle mais qui les conduit à mêler réflexion et éléments autobiographies. Cette proposition donne souvent des textes d’une surprenante force et maturité, à condition de bien en définir l’enjeu tout en la rendant concrète et abordable, par les mots utilisés pour l’introduire.
Expression écrite issue des annales de brevet
Le sujet choisi a été proposé en 1998, paru donc dans les annales 1999. Il suit un texte d’Andreï Makine, extrait du Testament français.
– Sujet :
Un jour, par hasard, vous découvrez un vieil album de photographies. Vous le feuilletez et découvrez une photographie qui retient particulièrement votre attention parce qu’elle évoque de nombreux souvenirs. Vous décrirez cette photographie avec le plus de précision possible puis vous développerez tous les sentiments et réflexions autour de la question de la mémoire et de son importance qui apparaissent alors dans votre esprit.
– Objectifs :
Ce sujet a pour mérite de permettre aux élèves de prendre appui sur un élément concret, une photographie, qui leur permet de mieux développer des sentiments et réflexions sur le passé.
MENER UNE ÉCRITURE LONGUE ET INDIVIDUELLE SUR LE THÈME DES POINTS DE VUE DANS LE RÉCIT
Séance d’écriture n°1 : Ecrire un texte à partir d’un tableau de Magritte : Le Mal du Pays
Les consignes
Au cours de cette première séance, il s’agit de faire écrire à partir d’un tableau de Magritte : Le Mal du Pays. La proposition d’écriture sera très libre : écrire un texte qui « parte » du tableau quelle que soit la façon que l’on a d’intégrer ce tableau au texte. Temps proposé : trente minutes. Cette propostion, pour le moins ouverte, permet, en fait l’éclosion de textes qui développeront de nombreux points de vue.
Lecture des textes
Les élèves sont alors invités à lire leurs textes. Personne n’y est forcé. La lecture est tout à la fois une manière de valoriser les textes écrits, de permettre une mise à distance, une socialisation. C’est tout cela à la fois. Durant cette phrase du travail, le professeur s’applique à montrer à chaqun la singularité de chaque écrit, tout en relevant les problèmes de langue ou de cohérence textuelle qui peuvent se poser.
Comme tous les types de points de vue vont apparaître dans les textes, il s’agit aussi de les relever et de montrer les effets très différents qu’ils ont sur le lecteur.
Réécriture / mise au propre
Aucun texte n’est laissé « dans la nature ». Les élèves sont invités à les recopier et à reprendre les points qui leur ont été signalés. Chaque texte est corrigé et l’élève bénéficie de « points d’expression écrite », qui sont attribués au fur et à mesure des exercices d’écriture et qui valorisent tout à la fois correction de la langue et originalité, c’est-à-dire, dans ce cas, l’investissement consenti puisque originalité il y a toujours dans cet exercice.
Synthèse
Ce cours introductif est suivi d’une synthèse de constats essentiels centrés sur la question des points de vue. Cette synthèse s’attache à citer des extraits de textes écrits par les élèves. On peut aussi reprendre certains textes à titre d’exemples, les taper et les distribuer à la classe au moment où l’ont fait la synthèse.
Séances suivantes : Ecrire un récit en variant les points de vue à partir d’une anecdote
Les principes du travail
Les séances se font toutes en classe et selon trois phases : écriture avec durée indicative, lecture / commentaire puis réécriture sont toujours présentes. Cependant, comme il s’agit, de fait, d’un exercice d’écriture longue (mais morcelé pour la facilité de la gestion), une fiche d’évaluation est donnée à chaque étape, qui insiste, en particulier, sur la notion de continuité du récit. Ces fiches sont établies grâce aux lectures qui permettent de se rendre compte à chaque fois des lieux de difficultés des élèves. Il n’y a donc pas de modèle. Ce sont des fiches évaluatives et pleinement (ou cherchant à l’être !) « formatives ».
L’anecdote support des activités d’écriture
Anecdote de départ : Une famille composée d’un couple et de deux enfants (un garçon adolescent ; une fille un peu plus jeune) vit dans une HLM de banlieue. La mère rêve depuis très longtemps d’aller passer des vacances sur la Côte d’Azur ; un poster, collé dans la cuisine, témoigne de ce désir, de ce regret permanent de ne pouvoir y aller. Ils n’en ont pas les moyens. Un jour, pourtant, le père parvient à réunir l’argent et les voilà partis. Ils découvrent la mer, la plage... C’est le rêve réalisé malgré la location bien pauvre dans laquelle ils demeurent. L’argent, pourtant fait vite défaut : le père décide de voler pour subvenir aux besoins de la famille. Il entraîne son fils. La police les arrête...
Cette anecdote est issue du texte de Philippe Raulet, Pitiés, magnifique roman publié aux Editions Verticales, dont voici la première page, pour hommage.
Une femme rêvait de elle est mariée, ils à cette heure-ci on cuisine peinte en jaune, murs assis sans être infirme les deux coudes plantés encore que ce ne soient pas sans qu’il soit ce qu’on appelle dans le coin gauche et non (Philippe Raulet, Pitiés, |