Communication

, par Inspection pédagogique régionale de Lettres

La communication dans la classe : un objet d’apprentissage en Lettres.
Comment s’adresser à la classe, comment interagir et laisser interagir sans risque ?

Le professeur dans sa classe est mis devant nombre de dilemmes professionnels que l’expérience et l’analyse de pratiques lèveront progressivement.
Zoon logikon, le professeur, dans sa classe, s’adresse aux autres « animaux parlants » que sont les élèves.
À ce titre, il est immédiatement repéré et repérable par sa manière de communiquer :

  • Au plan linguistique, il expose ses élèves à des modèles et des repères langagiers que sont le vocabulaire qu’il emploie, la syntaxe qu’il déploie, l’élocution qu’il manifeste.
  • Au plan affectif, la façon dont le professeur s’adresse aux élèves traduit son attention à les considérer comme sujets pleins et entiers et à installer la relation pédagogique.

Une communication complexe

La scène de la classe présente une communication complexe dans quatre dimensions qui se croisent et dont le professeur est le garant :

Espace de civilité
La classe est l’apprentissage de la civilité. L’élève est un être que l’on accueille et que l’on quitte de façon civile et bienveillante. La classe peut faire l’objet de l’apprentissage de ces règles.
L’approche interculturelle peut être féconde. Comment dit-on bonjour dans différentes langues ? La communication ne s’amorce pas de la même façon et la résonance n’est pas la même selon que l’on dise « bonjour » ou « que la paix soit avec toi ».

Espace réglé de l’école
Professeur et élèves usent de règles de prise de parole, respectent la parole des autres. Cet espace peut faire l’objet d’une étude : celle de l’argumentation orale dans différents espaces publics.

Espace d’échanges autour des savoirs
Notions, lectures, productions d’écrits sont des sujets à travailler dans les échanges oraux. C’est une forme attendue de l’échange en classe.

Espace d’échanges métacognitifs
En classe, on échange autour de la façon de faire, de rectifier, d’approfondir. Ce niveau d’échange est fondamental pour apprendre et comprendre comment on apprend. En orthographe, le débat permet d’exercer la vigilance orthographique, en lecture, on revient sur les procédures de base etc...

Du côté du professeur / Du côté de l’élève

Certains moments de la classe nécessitent ainsi une communication ajustée : accueil des élèves, rétroactions collectives et/ou individuelles (remise de copie, compte-rendu d’un conseil de classe, accueil d’un élève qui a été absent…), attention aux réactions des uns et des autres, gestion des conflits sont autant d’occasion où une communication maîtrisée contribue au climat de travail que l’on souhaite instaurer.

À rebours, l’élève en classe est pris dans un dilemme complexe : sommé de communiquer sur la scène de l’apprentissage, il communique parfois à mauvais escient soit parce qu’il intervient sur autre chose, soit parce qu’il converse de façon ordinaire et souvent peu normée, soit parce qu’il est trop muet, timide, peu participatif ou qu’au contraire il intervient systématiquement ne laissant guère place aux autres.

La classe est une scène de tensions difficiles à dénouer :

  • Classe muette et classe bavarde
  • Sollicitation à prendre la parole, mais obligation de lever le doigt
  • Nécessité de contrôler le cours mais attente de participation
  • Exigence du respecter des normes, au risque de rendre la classe muette
  • Place à une libre la parole mais nécessité de corriger les préjugés et les erreurs

Résoudre ces tensions

La solution, outre celle que donnera l’expérience, est à chercher du côté de la didactique et de la pédagogie de notre discipline.

La classe de Lettres est un espace privilégié pour apprendre la communication orale. C’est inscrit dans les programmes ; cela peut être un fil conducteur pour amener les élèves à concevoir la scène de la classe comme le lieu de l’apprentissage raisonné d’une parole respectueuse, libre et équilibrée.
Les programmes de Lettres mettent en effet en avant l’enseignement de l’oral.

  • L’introduction du grand oral, nouvelle épreuve du baccalauréat 2021, implique, tout au long du parcours de l’élève, une vigilance accrue aux situations d’interlocution mises en œuvre dans la classe et dans l’établissement. Un exercice progressif et spécifique des compétences qui relèvent de la communication non verbale se révèle nécessaire.
    Comme l’oral du DNB, ou l’épreuve orale anticipée de français, l’épreuve du grand oral conjugue oral en continu et oral en interaction. Le premier temps qui place l’élève en situation de parler debout, sans note, pendant 5 minutes invite à considérer cet acte de communication dans sa dimension polymorphe (linguistique certes, mais aussi physique, socio-affective, éthique…) qui engage soi, soi et l’auditoire/ l’interlocuteur, soi et sa voix, son souffle, son regard.
  • Dans les programmes de collège, l’enseignement de l’oral (sous toutes ses formes) est le premier champ d’apprentissage : « comprendre et s’exprimer à l’oral » au cycle 3 comme au cycle 4
  • Au plan pédagogique, l’attention portée aux situations de communication, dialogales et/ou monologales constitue un puissant levier pour assurer et apprécier l’effectivité des apprentissages. Les temps de formulation/reformulation/explicitation (d’une consigne, d’un questionnement, d’une démarche…) par un ou plusieurs élèves favorisent les apprentissages en ce qu’ils exercent tout à la fois les compétences langagières (expliquer/raconter/argumenter/opposer…) et les habiletés réflexives (Cf. Article « Réflexivité »).
  • Au plan didactique, le travail à partir de la « parlure » des élèves peut pleinement contribuer aux situations de travail proposées et à une réflexion sur la norme et les usages :
     En lecture / écriture / oral /étude de la langue, les mots employés par les élèves matérialisent des représentations, des a priori ou des savoirs déjà présents mais formulés différemment, dont l’identification permet de dénouer des difficultés et d’adapter le scénario pédagogique mis en œuvre ;
     En étude de la langue, la « parlure » des élèves permet d’aborder la notion d’acceptabilité d’un énoncé, de faire percevoir les différences et le continuum entre le langage de l’école, à l’école, hors de l’école : langage de la discipline, langage scolarisé, langage normé, langage privé…

La communication hors la classe : les réseaux sociaux

Aussi bien objet qu’outil de travail, la communication fait ainsi partie intégrante de l’éthique professionnelle du professeur. Poreuse, et, de ce fait, miroir des évolutions culturelles et sociétales, elle appelle, de sa part, une vigilance et une attention nécessaires pour que sa communication demeure professionnelle :

  • L’attrait des élèves pour les réseaux sociaux (facebook, instagram, snapchat, tik tok…) implique pour le professeur de veiller à ce que son identité numérique fasse la part entre ce qui relève du champ professionnel et de la classe et qui peut donc être partagé avec les élèves et ce qui relève du privé et qui doit donc rester « hors champ ».
  • S’il ne s’agit pas de récuser la plus-value pédagogique de certains réseaux sociaux ou plateforme de partage, il paraît opportun que tout recours à ce type d’outil (blog, atelier en ligne…) soit l’objet d’un travail organisé et régulé de la classe, commun à tous les élèves et que les actes de communication soient des actes collectifs et publiques.
Mots-clés associés
Oral - Enseignement des Lettres - Numérique

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