C’est par la compréhension des attentes de l’enseignant et la connaissance des formes d’écrits pratiqués dans les classes que l’élève allophone devient acteur de ses apprentissages.
L’activité de production d’écrit est complexe. Elle mobilise des compétences diverses qui impliquent particulièrement le sujet-écrivant. Pour les élèves allophones, l’utilisation de leur langue seconde est une charge cognitive plus importante encore : compétences linguistiques, univers de référence – et geste graphique, pour ceux qui ont appris une langue écrite dans un autre alphabet. Pour l’élève qui n’a pas été scolarisé antérieurement, l’apprentissage de la lecture et de l’écrit s’effectue simultanément à celui de la langue de scolarisation. Pour l’élève qui a déjà été scolarisé dans une autre langue, il lui faut transposer ses méthodes et connaissances. Le plurilinguisme et le multiculturalisme dans lesquels il évolue doivent être une richesse : à l’enseignant de lui permettre de construire les apprentissages pour passer d’une langue à l’autre, et de lui donner accès aux matériaux et fondations pour élaborer ses écrits.
Pour faire entrer l’élève allophone dans l’écrit, en lui permettant de développer des compétences à son rythme
- Proposer un sujet accessible à l’élève (qui ne demande pas d’autres connaissances que celles de la langue), pour les EANA.
- Éviter les sujets trop sensibles, relatifs au parcours de vie de l’élève et susceptibles d’engendrer une émotion qui pourrait être un frein au processus d’écriture.
- Faciliter/alléger le passage à l’écrit, en proposant, selon le niveau de l’élève :
– le recours à l’oral (dictée à l’adulte, à un pair, à un logiciel de transcription) - car ce n’est que lorsque l’élève a de solides compétences orales qu’il peut entrer dans les apprentissages de l’écrit ;
– à l’arrivée de l’élève EANA, l’autorisation de la rédaction dans sa langue d’origine ; puis le recours à la traduction (dictionnaire bilingue, applications sur téléphone et sur tablette : translator, traduire, DeepL Translate) ;
– le travail en binôme, avec un tuteur ;
– le recours au correcteur orthographique et aux outils de langue de la classe (cours, affiches, tableaux de conjugaison…) ;
– l’utilisation des temps du discours (un temps davantage maîtrisé par l’élève). - Aider à la planification :
– en rendant visibles les différentes étapes du texte à produire et la longueur attendue (sous forme de tableau à compléter, par exemple) ;
– en permettant la mutualisation des idées de la classe ;
– en construisant un univers commun de référence. - Proposer des outils langagiers correspondant à la situation d’écriture :
– des phrases d’amorce, des structures syntaxiques ;
– une banque de mots, un lexique illustré ;
– des textes sources reposant sur la répétition (pour faciliter la mémorisation). - Aider à la révision :
– en demandant une première production initiale puis en proposant des feedbacks pour les suivantes (ex : transformer les phrases simples en complexes, varier les reprises pronominales et lexicales, proposer des pistes pour enrichir le texte) ;
– en construisant une grille des attendus à la première personne (ex : j’ai utilisé le champ lexical de…) ;
– en autorisant la lecture des copies des camarades ;
– en établissant des fiches de relecture personnelle qui définissent les objectifs lexicaux ou grammaticaux à corriger, avec des aides à l’appui (référence, vidéo…).
Points de vigilance
- Les attendus doivent être bien explicités (et reformulés) à l’oral.
- L’évaluation formative est à privilégier.
- Prendre en compte le niveau langagier pour poser les attendus : des mots, des groupes nominaux, des phrases, un paragraphe…
- Les attendus de la longueur du texte sont à adapter, en diminuant le nombre de lignes ou en proposant de ne traiter qu’une des parties (ex : une étape de la description, une partie de commentaire…).
- Ne pas noter l’orthographe, si l’on veut privilégier le geste d’écrire ; réduire la correction orthographique à quelques lignes, si le texte est long (pour éviter d’alourdir la charge cognitive).
- Les étayages et les aides proposés, en fonction de l’évolution des compétences des élèves, sont à alléger au fil de l’année.
Pour aller plus loin...
- BEAUGRAND Céline et LECOCQ Bertrand (dir.), Écrire en FLS et FLSCO, Apprendre à écrire en français aux élèves allophones, 2019, CANOPE : https://cdn.reseau-canope.fr/archivage/valid/588444-28875-37179.pdf
- REMY-THOMAS, Florence, « Structurer l’écriture du français des élèves allophones », Le français aujourd’hui, 2003, 143, p. 69-77 : https://doi.org/10.3917/lfa.143.0069