Outils de travail

, par BERNOLLE Marie-Anne, Chargée de mission pour l’Inspection de Lettres

Le tableau, numérique ou traditionnel

Le tableau, numérique ou traditionnel est un outil de travail essentiel pour la classe dont l’utilisation, pour qu’il devienne un vrai outil de travail, mérite réflexion. Les usages sont variés, parfois féconds et parfois moins efficaces.

Petite typologie des usages
  • Le tableau « mémo », « mosaïque » : le professeur y note « un peu tout » : des mots dont il veut rappeler l’orthographe, des noms propres, des éléments de cours… Il permet de vérifier une date, une orthographe ; mais très rapidement, cette discontinuité le rend peu lisible, il perd son efficacité.
  • Le tableau « jeu de piste » : le professeur commence à écrire au centre puis à gauche puis à droite, puis tout en haut s’il reste de la place. Quelques flèches jalonnent le jeu de piste.
  • Le tableau à recopier : apparemment rassurant puisqu’il est l’image de ce que les élèves devront copier sur leur cahier et parfois bien utile, ses limites apparaissent rapidement pour le professeur comme pour les élèves. Le professeur est trop souvent face au tableau ; le décalage dans le temps de copie entre les plus lents et les plus rapides est difficile à gérer ; enfin et surtout, les élèves copient sans réfléchir et donc sans développer leur capacité d’écriture en autonomie, ils ne retiennent pas ce qu’ils écrivent.
  • Le tableau « plan » de séance, de lecture, de leçon : il a le mérite de la clarté, il donne le cadre, permet de suivre, surtout au lycée, les étapes du cours. Mais si la présentation complète est donnée à l’avance, elle donne le sentiment que « tout est joué avant la séance », qu’il s’agit de confirmer, de développer les axes définis par le professeur.

Il n’y a bien évidemment pas de modèle et les usages du tableau peuvent varier d’une séance à l’autre, mais on peut dégager quelques conseils ou principes :

  • Présentation : écrire à partir de la gauche du tableau ; dissocier une partie du tableau pour les notes de recherche collective et une partie pour les éléments stabilisés ; ne pas rester trop longtemps face au tableau ; aller de temps en temps au fond la classe voir si ce qui est écrit est bien lisible…
  • Fonctions : le tableau fixe l’attention sur un support commun. Il garde la trace de la réflexion de la classe de ses hypothèses, recherches, choix… ; sa fonction est dans ce cas essentiellement cognitive, il peut représenter le mouvement de la pensée sous forme de tableau, de schéma,….. Le tableau structure la réflexion ; il permet de classer, de hiérarchiser, d’ordonner collectivement. Le tableau permet de garder trace de l’essentiel, … Le tableau numérique conserve la trace d’états antérieurs du travail, facilite la réécriture, la comparaison de différentes versions favorisant ainsi l’échange et la métacognition ; il permet aux élèves de mesurer leur avancée dans le développement d’une compétence.

La photocopie

La photocopie est devenue un outil incontournable dont la commodité immédiate mérite d’être légitimée par un usage raisonné et modéré.
La photocopie est une liberté pour le professeur qui peut choisir ses corpus sans se limiter au manuel ou à l’œuvre intégrale et une facilité dans la gestion du temps de la classe quand elle évite la copie ou permet une présentation claire et soignée. Ces atouts ne valent évidemment que si le professeur apporte le plus grand soin à la présentation des documents qu’il distribue et veille, notamment en collège, à ce qu’ils soient collés, rangés à la bonne place.
La photocopie constitue également un outil de différenciation précieux : police et taille de caractères adaptées pour les dyslexiques, documents propres qui allègent la charge d’élèves dysgraphiques par exemple.

Les revers sont aussi nombreux que les avantages : peu écologique, la photocopie peut dévaluer ce qu’elle propose.
La littérature n’est pas une série de papiers isolés, progressivement cornés, perdus, mélangés, noircis sur les bords et plus ou moins bien imprimés. Coller un bilan, un tableau de conjugaison, une leçon de grammaire ne crée pas d’apprentissage.
Écrire soi-même, réaliser soi-même ou commenter le tableau de conjugaison, travailler à des définitions successives, réfléchir sur la langue, etc. et tout cela dans ses propres mots, est bien plus fructueux. Le professeur multiplie ainsi les situations d’écriture pour ses élèves sans avoir à « relever de copies ».

Cahier ou classeur

Le choix dépend souvent du niveau des élèves et des préférences de chacun ; il n’a pas d’importance particulière.
Chaque outil a ses atouts  :

  • le cahier évite les problèmes de rangement, facilite une trace écrite linéaire au fil des cours ;
  • le classeur offre une souplesse de rangement et donc une opportunité pour appréhender les grands domaines de la discipline, identifier les grandes étapes d’une séquence, d’un chapitre…
    La trace écrite est toujours prise entre deux écueils :
  • la trace écrite trop abondante qui occupe les élèves sans les faire travailler, car elle détourne de ce qui devrait être observé, échangé, réfléchi, compris, appris individuellement ou collectivement ;
  • l’absence de trace écrite qui, sauf projet spécifique d’oral, donne le sentiment qu’il n’y a rien à retenir, que la séance n’a rien apporté.

Pour l’élève

  • Écrire, essayer, réfléchir/ présenter
    Un « beau cahier » peut être un « cahier mort », mais il est nécessaire d’apprendre à « tenir son cahier », à organiser ses notes. La tension entre le soin et l’essai est au cœur de l’usage de cet outil. Les élèves considèrent souvent le brouillon, l’écriture de leur cru comme un écrit provisoire et préfèrent la version autorisée du professeur.
    L’essai, l’écriture de travail, l’erreur et son analyse, la réécriture, la révision, la correction, l’amplification, les hypothèses successives…. sont des activités intellectuelles essentielles et de vrais supports d’apprentissage. Il convient d’apprendre aux élèves à les assumer, à ne pas barrer ou effacer, craindre l’erreur... Cet apprentissage heurte avec profit certaines représentations de l’application, du soin purement formel. Il convient également d’apprendre, et cela jusqu’au lycée, à destiner son travail à autrui, à en faciliter la lecture, la compréhension, à en soigner la présentation.
  • Copier, coller, écrire
    (Cf. « Photocopie », ci-dessus)
  • Construire les savoirs
    Cahiers ou classeurs peuvent intégrer un glossaire alimenté au cours de l’année. On pense souvent à y consigner les définitions de termes techniques ; mais les notions importantes méritent également un travail de définition progressif. Il peut être intéressant d’ouvrir en fin du cahier, dans une section du classeur toujours accessible, un espace réservé à des fiches thématiques évolutives (complétées au fur et à mesure de l’avancement du travail) dans les différents domaines de la discipline : par exemple le verbe, les expansions du nom en grammaire ; héros et personnage ou roman, poésie, théâtre en littérature ; argumenter, comprendre, chercher pour les compétences, etc…
  • Ranger, classer
    Quel que soit le support, il est essentiel que le professeur accompagne l’organisation au fil de chaque séance.
    Essentiel aussi qu’au moment du bilan global du chapitre, pour faire le point, on prenne collectivement le temps de :
     se remémorer ce qui a été appris en feuilletant le cahier ou classeur,
     réaliser un sommaire,
     rédiger un bilan global,
     mettre en valeur l’essentiel,
     ranger ce qui ne l’est pas,
     récupérer ce qui manque ...
    Penser, classer comme le dirait Perec.
    Au collège en particulier, ces temps de rangement, de mise au point, sont importants ; certains élèves peuvent avoir besoin d’une aide plus personnalisée pour ce travail. La vérification régulière des cahiers/classeurs est importante. Le classement n’est pas inutile en lycée.
  • Consulter, réviser, mémoriser
    Le cahier, le classeur sont des outils de référence.
    Les élèves doivent apprendre à retrouver une leçon, une définition, à feuilleter un chapitre, à parcourir le travail réalisé pour une œuvre intégrale, à vérifier un point de langue…
    C’est parce que ces feuilletages trouvent leur place en classe que le cahier/classeur sera utilisé à la maison. Proposer aux élèves d’utiliser leur cahier pendant un contrôle, selon ce qui est évalué, n’a rien de transgressif ; c’est un moyen d‘apprendre à apprendre, à revisiter, mobiliser ses connaissances.
    Les élèves de collège ont particulièrement besoin que l’essentiel, ce qui doit être retenu, soit mis en évidence ; au lycée ce travail de métacognition, d’explicitation du processus d’apprentissage, se poursuit lorsqu’il s’agit de sélectionner ce qui peut être convoqué pour une dissertation ou un essai, de préparer l’épreuve orale de Première, etc.

Pour le professeur

L’organisation du cahier ou du classeur - par chapitres (thématiques, objets d’étude), par domaines (étude de la langue, littérature) - relève du choix de chacun et nécessite des essais pour trouver la forme la plus efficace. L’ampleur de la trace écrite, la place de documents photocopiés relèvent bien sûr du tâtonnement de l’expérience de chacun et de l’adaptation aux différentes classes.
En début de carrière en particulier, il peut être intéressant de s’interroger au moment du travail au bureau, sur ce que les élèves auront profit à écrire, à noter, ce qui peut être inscrit au tableau sans être copié. Dans une séance de lecture au collège, par exemple, le mouvement de la compréhension et le bilan que chaque élève rédige à l’issue de la lecture sont bien plus significatifs qu’une série de relevés. Le principe est le même en lycée avec la lecture linéaire.

Le carnet de lecture

Proche du carnet de création réalisé par les élèves dans les enseignements artistiques en lycée, le carnet de lecture est un outil très fécond pour l’appropriation des lectures et la constitution d’une culture littéraire et artistique.
Papier ou numérique, les formes du carnet de lecture varient, mais on peut dégager quelques principes :

  • Il est personnel : il n’obéit à aucun modèle imposé ; sa présentation varie d’un élève à l’autre. Il porte la trace du parcours de lecture singulier de chaque élève. Les goûts, les références, les rapports à la lecture de chacun y trouvent leur place. Il est personnel, il contribue à construire un rapport intime à la lecture sans être secret : il a toute sa place dans le travail en classe.
  • Il est hétérogène, discontinu, créatif : l’élève y consigne des notes rédigées ou pas, d’ampleur très variable, des citations, des impressions, des textes, des images, des éléments de critique littéraire, des écritures créatives ou d’autres pratiques artistiques….
  • Il n’est pas évalué en lui-même mais les réflexions, notes, éléments qui y sont consignés nourrissent les différents travaux écrits et oraux qui seront évalués. L’entretien des EAF par exemple est considérablement enrichi par l’usage du carnet de lecture pour l’œuvre choisie.
  • Il circule entre le monde et la classe, il crée du lien : l’élève y consigne ses réflexions sur les œuvres étudiées en classe, lues pour la classe ou découvertes et appréciées hors du cadre scolaire (livres, films, musiques, spectacles…). Il peut aussi y intégrer des références à l’actualité ...

Ordinateurs et tablettes

Certains élèves bénéficiant d’un PAP utilisent leur ordinateur en classe ; il est essentiel d’en accompagner les usages selon les mêmes modalités que les outils papier (voir supra).
Il est également indispensable d’exploiter les ressources spécifiques du numérique. Beaucoup d’établissements sont progressivement équipés d’outils numériques pour les classes ; il est essentiel que tous les élèves se familiarisent avec ces outils. La période de confinement a montré que la fracture numérique est encore forte et qu’elle tient autant aux équipements qu’au développement des compétences spécifiques.
Outre les usages communs à toutes les disciplines, ordinateurs et tablettes sont l’occasion de travailler en lettres la réécriture, la recherche documentaire, la réalisation de tableaux, schémas, de courts diaporamas supports d’une prestation orale, la mise en lien des documents divers….. Les images, tableaux, photographies, photogrammes ou extraits de films trouvent grâce aux outils numériques une qualité qui manque souvent dans les manuels.
Au lycée, il est indispensable d’intégrer l’ordinateur distribué aux élèves au travail de la classe, dans la perspective du supérieur.

Le portfolio

Le plus souvent numérique, il présente l’avantage d’un travail, d’une réflexion au long cours, en organisant selon des modalités variées, chronologiques, thématiques, ... les documents successifs qui y sont consignés.

Il peut :

  • attester de la maîtrise d’une compétence en consignant les travaux et réalisations successifs qui en manifestent l’acquisition,
  • permettre de rassembler les éléments d’une progression construite en équipe, notamment en grammaire,
  • rassembler les éléments divers par lequel l’élève commence ou poursuit son parcours avenir, etc.

Le dossier numérique (pad….)

Le confinement a particulièrement mis en évidence l’intérêt de constituer des dossiers numériques rassemblant l’ensemble des documents associés à un chapitre, à l’étude d’une œuvre, d’un parcours, etc.
Les dossiers réalisés par le professeur constituent une double référence :

  • les élèves s’y reportent pour compléter leur cours, trouver un document, classer leurs notes, trouver des idées, des exemples pour un devoir ;
  • ils y trouvent également des formes, des modèles possibles pour constituer à leur tour de petits dossiers seul ou en groupes.
    Les dossiers numériques sont particulièrement propices au développement du travail collaboratif, en présentiel ou à distance.

Le smartphone, les logiciels d’enregistrement

Les usages pédagogiques du téléphone portable ne sont évidemment pas interdits ; ils sont nombreux en classe comme à la maison.
L’entrainement à la lecture à haute voix, à l’oral en continu trouvent ainsi une régularité pour chaque élève impossible à réaliser en classe. Ces enregistrements peuvent être transmis au professeur ; l’écoute et la proposition de quelques conseils prennent peu de temps et contribuent très efficacement au développement des compétences orales des élèves.

Le blog de classe

Souvent utilisé au moment du confinement et très apprécié des élèves qui y ont trouvé un contact simple, rapide et assez informel avec leur professeur pour des conseils, des précisions, des réponses personnalisées, il peut constituer, s’il est bien maîtrisé, un outil d’accompagnement simple et efficace.

Mots-clés associés
manuels scolaires - apprentissage - bureau - séance / séquence - écriture - continuité pédagogique - corpus

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