Chapitre 1 - Quels points de vigilance ? Dossier - Le travail de l’enseignant à distance

, par Inspection pédagogique régionale de Lettres

Quels points de vigilance les professeurs ont-ils identifiés lors de la première semaine de mise en œuvre de la continuité pédagogique ?

Problématiques techniques et fracture numérique

Des difficultés de connexion aux serveurs, plateformes et outils institutionnels (ENT, blogs de classe, sites institutionnels, etc.) ont impacté les premiers jours, avant qu’un rythme plus fluide et fonctionnel ne s’installe.
Le contexte éclaire nettement les réalités hétérogènes et inégalitaires d’accès à un ordinateur et à une connexion auxquelles sont confrontés les élèves. En fonction des territoires d’enseignement, entre 20 et 60 % ont un accès limité voire pas d’accès du tout à internet pour des raisons multiples (raisons financières, un seul poste de travail pour toute la famille, télétravail des parents, etc.).

Une culture numérique inégalement partagée

  • Du côté des élèves et des familles
    Les enseignants interrogés – même parmi ceux qui ont régulièrement recours au numérique pour travailler avec leurs classes – font état d’une maîtrise variable des outils numériques par les élèves (savoir se connecter, savoir chercher les supports de travail, savoir les télécharger, envoyer un mail avec une pièce jointe, etc.).
  • Du côté des enseignants
    Certains enseignants interrogés – même quand ils utilisent déjà les supports numériques – témoignent de la nécessité d’acquérir davantage de compétences dans ce domaine pour accompagner aux mieux leurs élèves (concevoir des supports accessibles pour tous, savoir réaliser une capsule vidéo, créer et animer une classe virtuelle, etc.).

Une harmonisation difficile

Tous témoignent de la difficulté d’harmoniser les pratiques pédagogiques.

  • En termes d’accès aux supports pédagogiques
    Les équipes ont disposé de peu de temps pour harmoniser l’accompagnement des élèves à distance, par exemple en créant un espace d’accès simple aux supports de travail et aux ressources (dossier ou un espace de travail numérique commun à toutes les disciplines pour une même classe) ou en s’appuyant sur le professeur principal pour organiser des prises de contact avec les familles. Les élèves et leur famille doivent parfois aller chercher les supports de cours sur des espaces numériques différents et s’y perdent.
  • En termes de quantité de travail proposé aux élèves
    Les deux écueils régulièrement pointés sont l’alourdissement de la charge de travail des élèves ou, au contraire, son allègement qui ne permet pas aux familles de maintenir un temps de travail quotidien à la maison.

Mobilisation et persévérance

Force est de constater la mobilisation fluctuante des élèves et la difficulté à maintenir la persévérance scolaire.

Au terme d’une semaine, émerge le constat d’un engagement inégal des élèves, y compris dans les familles favorisées. Certains évoquent un manque de visibilité dans le suivi du travail à distance : qui se connecte ? qui travaille réellement ? que faire quand on n’a aucun retour ? Certains enfants manifestent du découragement ou de la fatigue.

Une temporalité différente

La temporalité de la classe n’est pas celle de la maison. Le contrat pédagogique est difficile à lancer et surtout à maintenir à distance. Cela peut engendrer la dissolution du sens dans des activités et des tâches sans réelle cohérence avec un projet littéraire ou un projet de formation de l’élève (batteries d’exercices de grammaire, activités ponctuelles sans rétroaction, etc.) et en parallèle, l’absence d’apports en termes de connaissances et de compétences ; enfin, la réaffirmation de la relation pédagogique parait essentielle pour éviter la dissolution du « groupe classe ».

La difficulté des familles

Les familles rencontrent des difficultés pour accompagner le travail à distance, notamment quand elles ne comprennent (ou ne savent expliquer) ni les consignes, ni la leçon.

Le risque réel de la surexposition aux écrans

Alourdissement de la charge de travail des professeurs

Cet alourdissement concerne en particulier l’organisation, la gestion individuelle du travail reçu. Les modes de communication demeurent complexes : envoi et explicitation du travail, aide individualisée via téléphone, production d’un travail, envoi, traitement, retour à l’élève : on constate des temps de rupture qui brouillent le travail global

Des modalités d’évaluation complexes à mettre en œuvre

Ces constats partagés invitent à repenser une programmation et une organisation afin de ne pas léser les élèves en difficulté face aux consignes écrites, afin de prendre en compte l’absence de connexions ou l’usage variable d’outils numériques et d’essayer de mettre en place des groupes d’échange entre les élèves, en synergie et en complémentarité du travail du professeur.

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